Reportage 2050 Now : Les Survivants du changement climatique : de la vigne à l’aloe vera
Posté le 03/12/2024
Le média 2050 Now est venu à Fitou pour parler changement climatique, viticulture et culture de l'aloé vera. Dans le sud de la France, près des Pyrénées-Orientales, Laurent et Marie un couple de vignerons gérants du domaine Le Champ des Soeurs, font face à l’impact du changement climatique. La sécheresse persistante a gravement affecté leurs vignobles, les poussant à repenser leur modèle agricole. Ce reportage explore leur transition vers la culture d'aloe vera, une plante bien plus adaptée aux conditions arides.
Depuis plusieurs années, la région connaît une baisse des précipitations et une augmentation des températures. Alors que la vigne nécessite 350 mm d'eau pour boucler son cycle, les précipitations annuelles dans cette zone sont tombées à environ 250 mm. Ces conditions ont entraîné des pertes importantes de rendement. Par exemple, sur les deux derniers millésimes, Laurent et Marie ont vu leurs cuves rester partiellement vides.
Diversifier les cultures
Le couple a ressenti les premiers signes alarmants dès 2013, mais la situation s’est fortement dégradée depuis 2020. Face à des pertes atteignant parfois 80% de leur récolte, ils ont pris la décision audacieuse de réduire leur production viticole pour diversifier leur activité avec la culture d’aloe vera. Ce choix, d'abord critiqué par leur entourage, semble aujourd’hui judicieux.
Benjamin Augros, fondateur d'Aloe de Leucate se joint à l'aventure
Benjamin, un jeune agriculteur passionné, joue également un rôle dans cette transition. Il s’est joint à Laurent et Marie pour apprendre les spécificités de la culture d’aloe vera et intégrer ces connaissances dans ses propres projets. Dans ses rangs d’oliviers, Benjamin a déjà planté 700 pieds d’aloe vera, démontrant son engagement envers une agriculture diversifiée et résiliente. Sa collaboration avec Laurent souligne l’importance de la transmission des savoirs et de la mise en réseau entre producteurs pour accélérer l’adoption de solutions durables face au changement climatique.
L'aloé vera : une plante adaptée au changement climatique
L’aloe vera présente de nombreux avantages dans ce contexte climatique. Nécessitant cinq fois moins d'eau que la vigne, il s'adapte bien aux sols secs. Cependant, cette culture n'est pas sans défis. L’aloe vera est sensible au gel et à l’excès d’eau. Pour protéger leurs plants, Laurent et Marie ont installé des serres, avec l’aide du maire de leur village, Fitou. Ils ont également développé une pépinière pour produire de nouvelles plantes à partir des drageons (jeunes pousses).
Le reportage met également en lumière l’importance de la recherche scientifique pour comprendre les effets du changement climatique sur l’agriculture. Antoine Doncieux, doctorant au CNRS, explique comment les sécheresses prolongées, comme celle de 2022, affectent la croissance des plantes, réduisent les rendements, et compromettent la viabilité des vignobles à long terme. Ces phénomènes, directement liés au réchauffement climatique, devraient s’intensifier dans les décennies à venir, rendant l’adaptation cruciale.
Pour Laurent et Marie, l’aloe vera est bien plus qu’une alternative agricole : c’est une opportunité de redonner du sens à leur métier. En plus de cultiver cette plante, ils se sont lancés dans sa transformation pour produire des gels et des jus, augmentant ainsi la valeur ajoutée de leur production. Par exemple, un litre de gel d’aloe vera peut être vendu entre 15 et 20 euros, rendant cette activité plus rentable que la vigne.
Un collectif autour de l'aloé vera
La transition vers l’aloe vera s’accompagne d’un effort collectif. Laurent a co-fondé Aloe d'Oc, une structure regroupant des producteurs comme Benjamin Augros et des transformateurs pour mutualiser les ressources et augmenter la visibilité de leur produit sur le marché. L’objectif est de bâtir une filière solide et crédible, capable d’attirer l’intérêt des industriels et des consommateurs.
Le reportage se termine sur une note optimiste. Bien que le chemin reste semé d'embûches, notamment avec les risques de gel hivernal, Laurent et Marie se considèrent comme des "survivants du changement climatique". Ils espèrent que leur histoire inspirera d'autres agriculteurs à diversifier leurs cultures et à explorer des solutions innovantes pour s’adapter à un environnement en mutation rapide.